“Las Sirenas Incaicas à Mexico pour Dia de Muertos”

Temps de lecture : 38 minutes

Articles illustrés par nos photos de voyage ainsi que par les photos de Vogue au Mexique, avril 2021.

Jour 1: Arrivée à Ciudad de México (CDMX) et Polanco


Nous y voilà! C’est avec un grand  enthousiasme que nous reprenons notre blog, après une longue période de  maturation. Il y a comme un appel: à peine quelques heures que nous  sommes enfin sur le sol mexicain que l’envie d’écrire nous reprend!  L’envie de partager est tout autant présente. Nous voulons vous faire  vivre avec nous notre expérience à la découverte de la capitale de ce  pays: en Ciudad de México! C’est non sans un mélange de connu  et d’inconnu que nous vivons cette première journée, à la croisée de New  York et de Lima, comme un mélange de ces deux villes réunies en une  mais qui a cependant sa propre identité même si nous ne faisons que la  deviner en ce jour de jet-lag et de pluie de fin de journée.  Entre les écureuils funambules sur les câbles emmêlés du quartier de  Polanco et les colibris multicolores qui viennent butiner ici et là,  sans oublier les canidés de toutes races qui traversent le quartier,  c’est avec légèreté que nous arpentons Mexico City.


D’ailleurs,  nous avons dès aujourd’hui trouvé une “pépite” sur notre chemin, en  sillonnant les rues de notre quartier et fait la rencontre de la  créatrice de Cuicari “Mandalarte”, une talentueuse orfèvre du textile  qui tisse de magnifiques bijoux et artefacts selon des mandalas  traditionnels mexicains et nous pouvons d’ores et déjà vous dire que  cette rencontre fera certainement l’objet du prochain article “Trésor  d’artisanat tendance” sur le blog! 

Jour 2: Visite du Centre historique de CDMX et premiers pas dans Coyoacan

Une journée totalement imprévue mais finalement réussie! Nous avons d’abord commencé par nous rendre à l’Alameda, avenue arborée près du centre historique et du Palais de Bellas Artes afin de voir le mural de Diego Rivera éponyme Sueno de una tarde dominical en la Alameda Central (Rêve d’un après-midi dominical à l’Alameda). Et pas de chance, car ce minuscule musée qui abrite cette si grande fresque est fermé le lundi comme beaucoup d’autres lieux d’ailleurs… En parcourant l’Alameda puis les rues depuis le Palais des Beaux-arts, nous avons de nouveau ressenti cette crainte d’être malgré tout, des touristes dans un pays où règne l’insécurité car il faut bien l’admettre, le Mexique recèle de trésors mais comme quasiment tous les pays d’Amérique Latine, parfois au prix de sa propre sûreté… Ambiance hostile, coup de stress: nous étions sur le qui-vive et quelque peu désappointées par cette nouvelle destination.

Heureusement, nous avions rendez-vous avec notre Dona Fe, une amie très chère que Kyralina avait pu rencontrer au Pérou et avec son compagnon, nous sommes revenus sur nos pas depuis Bellas Artes jusqu’au Zocalo en passant par mille détours! On vous raconte!

D’abord, nous avons pu monter au 43ème étage de la Torre Latino, un monument que nous ne pensions pas visiter mais qui offre une vue panoramique sur toute la capitale. Du haut de ce gratte-ciel, nous apercevons le gris des nuages entre des interstices de soleil qui viennent se poser sur les toitures des édifices contrastés de México City. Ce n’est pas beau mais impressionnant de voir l’immensité d’une ville s’étaler sous nos yeux,  nous rappelant le Rockfeller Center ou encore l’Empire State Building de New York, la démonstration de puissance n’est pourtant pas toute à fait convaincante vue d’en haut… “Pauvre Mexique, si loin de Dieu, si près des États-Unis…” ainsi le disait l’ancien président du pays, Porfirio Diaz.

Ensuite nous avions décidé d’aller au Zocalo : la place principale au cœur de la ville mais nos amis locaux nous ont fait faire des détours que nous n’aurions jamais pu voir seules! Nous sommes passés par Garibaldi et sa place aux statues de Mariachis jusqu’au marché très populaire voire carrément pauvre de Lagunillas où aucun touriste n’ose s’aventurer… Nous avons repensé à ces grands marchés liméniens au Pérou où la misère travaille sans relâche. Un dédale de rues aux stands où on trouve de tout et n’importe quoi (chaussettes, sous-vêtements, meubles…) jusqu’à une allée spécialisée parmi d’autres et plus agréable, de robes de mariées avec des prix défiant toute concurrence et des robes de “Quinceneras”: cette fête des 15 ans où toute fille devient (qu’elle le veuille ou non), une “femme”… Entre gros cerceaux, paillettes et kitsch invraisemblable, la réalité paraît bien édulcorée.  Après avoir déjà bien marché, nous avons opté pour un drôle de transport: une bicyclette avec banquette pour 4 personnes et un seul conducteur qui, à la force de ses bras, nous a emmené d’un point à un autre, nous rapprochant du fameux Zocalo!

Là, la place était étrangement vide et presque tout autour était fermé (lundi…), nous avons tout de même pu apercevoir ces chamans vêtus de costumes aztèques, parés de plumes, de coquillages et opérant sur tout passant désireux de se laver l’âme et de se purger une cérémonie farfelue où encens et cris d’animaux permettent ce “nettoyage spirituel”! Déconcertant! Ensuite, nous avons pu voir les ruines du Templo Mayor, découvertes il y a peu (en 2015) où les vestiges préhispaniques viennent repeupler la modernité de ses créatures sacrées parmi lesquelles le serpent tient une place à part, en hommage à Quetzalcoatl, le serpent à plumes. Nous nous sommes finalement acheminés vers Coyoacan, où nous ne pensions pas aller aujourd’hui! Nous avons pu prendre le métro mexicain, puis un combi et nous sommes arrivées dans ce quartier enchanteur aux mille couleurs. Bohème à souhait et d’une tranquillité appréciable, nous sommes passées devant les portes du musée de Magdalena Frida Carmen Kahlo Calderon soit la légendaire Casa azul de nos rêves (qui était fermée en ce jour).

A ce moment-là, nous commencions vraiment à ressentir la faim car nous marchions déjà depuis des heures! C’est alors que Don Raul, (l’ami de notre Dona Fe) a eu la bonne idée de nous emmener manger au très pittoresque marché de Coyoacan! Nous en avons pris plein les yeux avec tous les petits objets et artefacts multicolores : calaveras (crânes spécialement décorés de différentes couleurs au Mexique), pinatas, papel picado et autres merveilles de papier et de carton qui apportent vie, joie et éclat partout. Et nous avons mangé, de manière très simple, attablés au comptoir de chez “Vicky’s” et c’était bien bon et sain même car la cuisine mexicaine aussi savoureuse soit-elle est connue pour ses plats épicés mais aussi souvent gras.

Après ça, c’était plus tranquille car nous avons pu prendre le “Tranvia”: petit tramway tout de bois à l’intérieur pour une promenade très jolie dans Coyoacan avec un guide adorable et captivant! Les couleurs, l’art floral, les magnifiques arbres et ce parfum d’histoires et d’anecdotes ponctué par tous les artistes et grands personnages de Mexico donnent vraiment du cachet à ce lieu.

Jour 3: Musée d’anthropologie de CDMX et promenade sur l’eau à Xochimilco

Nous venons de passer une magnifique journée sous un soleil resplendissant qui a réchauffé nos cœurs entre l’incroyable musée d’anthropologie ce matin et une joyeuse promenade sur l’eau à Xochimilco, un des plus anciens lieux de CDMX!

D’abord, nous avons pu aller à pied au magistral musée d’anthropologie de Mexico, le plus grand musée de la ville et un des plus grands au monde! Nous avons été impressionnées par la qualité des espaces, l’architecture moderne mais bien appropriée et la magnificence des salles. De la salle des origines du monde à la salle Maya en passant par la salle Teotihuacan, Oaxaca, Mexica… nous avons parcouru huit salles sur onze du premier étage! Et cela a été tellement agréable et passionnant comme une sacrée révision de mes études d’archéologie préhispanique en licence d’histoire de l’art et d’archéologie précisément à la Sorbonne (Olyanna).

Les collections permanentes dédiées à chaque civilisation préhispanique rivalisent de splendeur et de beauté. L’agencement du musée alterne entre espaces intérieures et espaces extérieurs avec un jardin qui donne l’impression de se retrouver au beau milieu des ruines enfouies sous la végétation! Il y a de très belles reconstitutions tout au long de la visite, depuis l’introduction à l’anthropologie avec l’évolution des premiers hommes et animaux sur terre jusqu’aux sociétés mésoaméricaines, à l’instar de la reconstitution de Teotihuacan tout en couleurs, comme elle l’était jadis! Un tel souci du détail (l’utilisation de la couleur ici par exemple) est rare dans les présentations muséales outre-Atlantique (merci l’européocentrisme!) Nous avons pu admiré autant de petits artefacts très raffinés témoignant de la complexité de ces peuples, ornés de coquillages, de jade, d’obsidienne, de motifs incisés et peints aux colossales stèles de pierre telle la Piedra del Sol, emblématique calendrier aztèque ou encore les têtes olmèques avec lesquelles un dialogue s’est instauré depuis longtemps. Nous avons salué les divinités phares de cette incroyable cosmogonie, Tlaloc le dieu de la pluie, Coatlicue et sa jupe de serpents entremêlés et bien sûr le superbe Quetzalcoatl, le serpent à plumes. Nous en sommes sorties émerveillées avec l’envie d’y retourner pour découvrir le second étage consacré à l’ethnologie mexicaine.

Après une petite pause bien méritée dans Polanco, nous voilà finalement parties pour Xochimilco! Changement de programme car le temps était magnifique, nous avons eu envie de vivre cette expérience unique. Après un trajet en taxi d’un peu plus d’une heure où nous avons pu voir un autre visage de cette métropole tentaculaire, nous arrivons à l’embarcadère de Xochimilco. Grâce à notre nouvelle amie Marta, française vivant au Mexique depuis plusieurs années, nous sommes tout de suite prises en charge par quelqu’un de confiance qui nous mène à notre “trajinera”.

Comment vous expliquer ce qu’est une trajinera? Ce sont ces fameuses “barques” de toutes les couleurs avec le nom bien souvent de celui ou celle pour laquelle on la conduit sur l’eau, écrit en lettres majuscules et décoré de peinture et/ ou de fleurs. Cet endroit magique qu’est Xochimilco est un des plus anciens lieux de Mexico car c’est ce qu’il reste de la lagune originelle de Texcoco quand la capitale s’appelait encore Tenochtitlan (nom donné à la ville à l’époque aztèque entre autre).

C’est dans une ambiance pittoresque à souhait, chaleureuse et chamarrée, que nous déambulons sur l’eau, grâce à notre “rameur”, Ernesto, adorable habitant de ce jardin flottant qui s’improvise guide le temps de cette balade au rythme du folklore purement mexicain! C’est l’occasion idéale de découvrir l’art des célèbres Mariachis qui offrent leurs chansons “en paquete”. Bon, étant des voyageuses prudentes, nous n’avions pris que l’argent strictement nécessaires pour l’excursion et nous avons vidé nos poches pour écouter une sérénade chantée tout spécialement pour nous, “Ay ay ay no llores” (Cielito lindo, canto y no llores).

Moment de charme d’un autre temps, l’émotion était au rendez-vous derrière nos grands sourires. Deux heures au fil de l’eau, où le temps est suspendu, entre curiosités (comme la “isla de las munecas” avec des poupées à moitié amputées et dénudées qui sont accrochées aux branches des arbres sur un petit îlot!) et effervescence digne d’un véritable marché ambulant: si tu as oublié quelque chose sur la trajinera, tu peux tout acheter à bord, des coups à boire (pulque, mezcal, tequila, micheladas, de quoi s’enivrer jusqu’à la nuit tombée!), de la nourriture bien sûr! Mais aussi des couronnes de fleurs et autres colifichets, d’ailleurs l’endroit est prisé des enterrements de vie de jeune fille, anniversaires, demandes en mariage, bref fêtes en tout genre!

Et c’est le cœur en fête que nous repartons de Xochimilco, non sans une pointe de mélancolie en écoutant le dernier refrain de la Cancion del Mariachi (incarné par le ténébreux Antonio Banderas dans un film de Tarantino avec Salma Hayek). En somme, des sirenas comme des poissons dans l’eau!

Jour 4: Du château de Chapultepec aux murs de la Casa Azul, chez Frida à Coyoacan

Une nouvelle journée sous le signe du soleil à Mexico City! Nous avons de la chance avec la météo, et grâce à notre nouvelle amie “bonne étoile” Marta, au lieu de chercher où laver un peu de linge, nous avons pu découvrir l’immense parc de Chapultepec (le plus grand parc urbain de toute l’Amérique latine et un des seuls châteaux du continent). Nous avons pu dire bonjour aux magnifiques écureuils roux et argentés (les deux couleurs à la fois!) qui sont venus déjeuner sous nos yeux amusés et attendris! Quel spectacle pour commencer la journée! Cet immense bois conduit au château (résidence de Maximilien de Habsbourg entre autre) et nous fait ressentir l’altitude de la ville car Mexico se trouve tout de même à plus de 1000 mètres d’altitude!

Nous avons vu notre premier mural: d’abord celui d’un des trois “Grands” (parmi les trois grands peintres muralistes du Mexique au XXe siècle, Rivera, Orozco et Siqueiros), “La Revolucion” selon David Alfaro Siqueiros, aussi impressionnant (par ses dimensions car il s’étend dans une salle entière) que poignant (par son sujet, la Révolution mexicaine, violente et sanglante). Nous avons donc également vu notre premier mural de Diego Rivera qui traite également de la Révolution, magistrale et dans le style si humaniste propre à l’œuvre de Rivera. Après avoir arpenté quelques salles très luxueuses ornées d’objets de style Empire et néo-classique, nous avons pu admirer la vue imprenable qui surplombe le bois de Chapultepec, ce qui signifie en nahua “l’endroit des chapulines, des criquets” et d’ailleurs, on retrouve ce petit insecte un peu partout sur les statues et fontaines du site.

Puis une pause s’impose et nous retournons dans notre quartier déguster de savoureuses “chilaquiles”.

L’après-midi est plus qu’une visite d’un musée, c’est un moment d’hommage et de pèlerinage en franchissant le seuil de la Maison bleue de Coyoacan dont le mythique fronton annonce “Diego y Frida vivieron en esta casa” (1929-1954). Si nous l’avions vue dans le film éponyme Frida, à travers maintes revues, magazines, reportages, dans les livres et les albums, cette maison a surpassé de loin toutes nos espérances, tant le souvenir de ceux qui l’ont habités y est palpable…

Aussi, pour vous faire part de cette expérience qui nous a été si chère, nous qui admirons ces artistes, la colombe et l’éléphant, depuis si longtemps, nous choisissons d’adresser une lettre à Frida et de la partager avec vous:

“Gracias a las enfermeras, a los camilleros, a las afanadoras y mozos del hospital (…) y a mi fuerza de voluntad. Espero alegre la salida y espero no volver jamas.” Frida Kahlo. Citation qui orne l’altar (comprenez l’autel érigé en l’honneur de la fête des morts) et qui signifie “Grâce aux infirmières et aux brancardiers, aux soignantes et aux jeunes de l’hôpital (…) et à ma force de volonté. J’espère la sortie joyeuse et j’espère ne jamais revenir.” C’est par tes propres mots, qui résonnent en nous, que nous commençons cette lettre, chère Frida.

C’est drôle car cette phrase que tu as écrite comme une épitaphe, nous fait penser à ce que disait notre chère grand-mère défunte en parlant de la Mort, “si on n’en revient pas, c’est que ça doit être sacrément bien là-haut!”. Frida, toi qui as peint cette nature morte aux pastèques où on peut lire “Viva la vida” et qui avec ton courage sans bornes a démontré que la vie peut être à la fois complètement merdique et magique mais dans tous les cas, elle vaut la peine autant que la mort, ce voyage dans l’au-delà qui nous attend tous un jour ou l’autre!

Frida, comment-te dire à quel point nous nous sommes senties proches de toi aussitôt que nous t’avons découvert, toi et ton œuvre? Est-ce un hasard d’ailleurs si lors de nos premiers pas de flamenco, vêtues de robes à fleurs que notre autre grand-mère, celle qui est toujours de ce monde, notre chère Mamie Michèle, nous avait prêtées, on nous appelait Olyanna et moi, Kyralina, “les deux Frida”?

Alors en quête de nos origines hispaniques, esquissant quelques pas encore maladroits mais plein d’une grande détermination, nous étions ces jumelles, un peu à part, que tout unit. Parées comme toi, de bijoux chinés et de mille couleurs, faisan fi du regard des autres, nous étions alors prêtes à avancer. L’art nous a toujours accompagné, à travers la peinture à l’huile que nous avions la chance de pratiquer dans un petit atelier de Longjumeau, la danse des gitans un peu plus tard, puis l’écriture quelques années après. Et tentons encore un parallélisme qui nous tend un miroir face à toi, chère Frida, de la même manière que tu peignais des autoportraits, cette lettre prend des airs autobiographiques qui traduit la nécessité d’exister à travers la création.

Dès 15 ans, nous avons su nous détacher du regard des autres car la vie en a décidé ainsi pour nous et nous avons aussi pris ce chemin par nous-mêmes et pour nous-mêmes. C’est à partir de là, que nous avons assumé d’aimer la Mode avec un grand M, le folklore et l’artisanat d’art, en particulier des cultures latino-américaines, ce qui a ensuite guidé nos goûts, nos études et nos voyages pour te rencontrer aujourd’hui dans ce mausolée splendide qui était autrefois ta maison. Cet univers que tu as créé, avec tes dessins, tes peintures, tous ces objets d’art, d’archéologie et d’artisanat, tout ce Mexique à portée de main, ces robes, ces bijoux et tous les animaux qui ont vécu avec toi, chiens, perroquets, singes et même faons et biches! Tout ce que tu as chéri, nous renvoie à nos propres amours pour les couleurs, l’art, la nature…

En bref, si nous avons déjà la chance de vivre la gémellité, nous te choisissons comme “sœur”, comme une muse qui ne cesse de nous inspirer, de nous faire aimer la vie, qu’elle ait la beauté et la nostalgie ou qu’elle suinte de tequila et de tabac, qu’elle danse avec la mort ou qu’elle chante et crie avec l’allégresse de se sentir vivantes. Qu’elle vibre avec un amour indestructible ou qu’elle tournoie dans des passions ardentes, qu’elle soit éternelle ou éphémère, comme un vol de papillons. Nous la célèbrerons.

Jour 5: Défilé d’églises baroques de Cholula à Puebla, hors de Mexico CMDX

Première sortie hors de Mexico City avec notre sympathique chauffeur, Alaïn, pour aller dans l’État de Puebla et parcourir un sentier jonché d’églises aussi magnifiques les unes que les autres. Pour y arriver, nous avons fait environ deux heures de route et vu les montagnes mexicaines, très arborées et les habitations de fortune qui s’étalent tout au long du trajet. A ce moment-là, nous trouvons plutôt des points communs avec le Péou que nous connaissons que des différences. Nos pensées jumelles se croisent et retrouvent l’écho du discours d’Ernesto Guevara, avant que cet idéaliste invétéré ne soit le personnage politique, tel qu’on peut l’entendre dans notre film fétiche, Carnet de voyage (Diario de motocicleta, de Walter Salles, 2004) dont voici un court extrait:


«Nous croyons, et depuis ce voyage avec une plus grande fermeté que jamais, que la division de l’Amérique latine en nationalités illusoires et incertaines est complètement fictive. Nous constituons une unique race métisse, qui depuis le Mexique jusqu’au détroit de Magellan présente des similitudes ethnographiques notables. C’est pourquoi, essayant de me libérer du poids de tout provincialisme mesquin, je porte un toast au Pérou et à une Amérique unie».

Le site de Cholula commence par la visite d’un petit musée didactique avec une maquette qui montre bien que l’église a été construite sur la base d’une pyramide pré-hispanique (et on parle d’une des plus grandes pyramides du Mexique et du monde entier en largeur). Sur cette grande esplanade, les vestiges et excavations sont bien visibles et on a encore le plaisir d’apercevoir de merveilleux écureuils ainsi que de grands papillons aux couleurs solaires et même une parulline : un tout petit oiseau tout rouge, magnifique. Après avoir parcouru l’esplanade, il faut monter jusqu’à la Virgen de los Remedios: nom donné à l’église colorée dans les tons jaunes qui surplombe le site et d’où on peut entrevoir le volcan Popocatepetl.

Un site qui mérite d’être vu et encore une fois le soleil nous a fait grâce de sa présence, comme une réminiscence de l’empire aztèque. Puis nous avons repris la route pour voir les superbes églises baroques du petit village de Santa Maria Tonantzintla, qui témoigne du syncrétisme religieux mexicain. Des façades peintes et toutes ornées de motifs floraux et animaliers et, lorsqu’on franchit le seuil, une avalanche de décors envahit l’espace, entre saints aux couleurs locales parmi lesquels trône la célèbre Virgen de Guadalupe, au teint de cuivre et aux atours étoilés, et des centaines d’anges moulés au plafond dont certains sont coiffés de serpents, rappelant la divinité suprême de la cosmogonie aztèque, Quetzalcóatl. Un petit parcours pittoresque, comme une image d’Épinal d’un Mexique aussi folklorique que magique, comme figé dans le temps.

Nous poursuivons notre excursion jusqu’à Puebla, et là, la déception est au rendez-vous: malgré la présence de cathédrales édifiantes aux coupoles raffinées, nous nous attendions à l’atmosphère paisible d’un petit village foisonnant d’artisanat. En lieu et place, nous voilà dans une des quatre plus grandes villes du pays! Avec en prime, une manifestation qui nous a vraiment dissuadé de flâner dans la ville car au Mexique, (bien qu’il s’agisse d’une manifestation assez festive : un anniversaire d’un évènement important?), les regards disent qu’il ne vaut mieux pas s’attarder…A notre arrivée à Puebla, nous étions littéralement affamées et fatiguées et nous nous sommes donc retrouvées à la table d’un restaurant touristique où nous avons malencontreusement eu l’idée de déguster une “cemita”: spécialité de Puebla comme un sandwich bien garni mais là, c’était déjà bien trop gros pour nous et pas bon du tout!

Nous avons en revanche bien apprécié notre retour en voiture avec notre chauffeur, un Mexicain de 33 ans, jeune père de famille qui nous a parlé de la réalité de son pays, entre manque d’éducation de manière générale, misère et corruption, délinquance jusqu’à la mort car ici, la vie ne vaut rien! Surtout quand on est personne, un pays qui comme beaucoup en Amérique Latine, recèle de trésors aussi bien que de problèmes publiques d’une gravité difficile à imaginer en Occident.

Jour 6: Une journée entre les fresques de Rivera et parmi les morts de la Catrina

Aujourd’hui, nous avons enfin pu voir pour de vrai les fresques murales de l’artiste Diego Rivera, immense peintre mexicain et époux de Frida Kahlo entre autres. C’est un autre rêve qui se réalise car j’ai (Olyanna) étudié l’œuvre de Rivera, sa période cubiste mais voir le cœur de son art en plein centre de Mexico, cela vaut son détour! Lui qui a tant souhaité rendre hommage à son peuple, son pays et ses ancêtres mais aussi à sa philosophie indéniablement marxiste et progressiste. Malheureusement, nous n’avons pas pu entrer au Palacio Nacional (car il est toujours fermé en raison de la pandémie et donc voir les fresques de la Conquête etc.) mais voir ce mausolée du Mexique zapatiste créé par Rivera au Secrétariat d’Éducation publique: en un mot, colossal.


Tout le bâtiment sur deux étages entoure un patio verdoyant et se trouve recouvert de fresques dont la continuité est à la fois historique et thématique. Du Mexique des origines, préhispanique, avec ses couleurs et ses traditions tels que le célèbre Dia de muertos à l’honneur en ce moment-même dans tout le pays, ses paysans, ses travailleurs, ses femmes et ses enfants, ses professeurs ruraux sans parler de ses mythiques révolutionnaires, la peinture de Rivera se fait bible du prolétariat.


Nous avons également pu voir l’exposition temporaire du moment, qui célèbre le passé préhispanique si cher à l’artiste… Tout y était réuni pour notre plus grand plaisir, des codex incroyablement bien conservés aux stèles foisonnant de détails, tous très significatifs d’ailleurs, en passant par de multiples artefacts dans une salle où s’étend une carte de l’Amérique latine, pour le moins édifiante, qui rappelait la Conquête et où figure Christophe Colomb.

Après avoir admiré chaque pan de mur et en avoir photographié nombre d’entre eux, nous avons suivi l’excellente idée de notre amie Marta : manger au MuMeDi (Musée Mexicain de design) et là, ambiance urbaine à la fois chic et décontractée où nous avons très bien déjeuné et pu goûter en dessert un “pan de muerto negro”: le traditionnel “pain des morts” qui ressemble plus à une brioche légèrement aromatisée à la fleur d’oranger, sucrée à l’extérieur mais celui du Mumedi était noir et fourré d’une crème pâtissière, délicieux!


C’est après ce moment de détente que notre journée s’est placée sous le signe des montagnes russes, entre flippe et joie de la découverte. Nous sommes allées voir un autre mural célèbre de Rivera qui est dans un petit musée dédié au bout de la Alameda Central, et pour cause, la fresque rend directement hommage à cette avenue arborée de Mexico: “Sueno de una tarde dominical en la Alameda Central” met en scène autant de couleurs que de personnages emblématiques et historiques de la ville: se lisant de gauche à droite, elle retrace plus ou moins de manière chronologique les différents épisodes politiques de la Conquête (avec Cortès à l’extrême gauche de l’œuvre) jusqu’à l’époque contemporaine de Rivera, en passant par le Porfiriato… Se nichent au centre le peintre lui-même représenté en enfant, donnant la main à la Catrina parée de son boa à plumes (référence ici à Quetzalcoatl, le serpent à plumes), personnage créé par le caricaturiste José Luis Guadalupe Posada et qui est devenu l’icône du Dia de Muertos, se moquant de l’aristocratie et qui prend les traits d’une calavera (tête de mort), il y aussi Frida, énigmatique, tenant le ying et le yang, comme si c’était elle qui détenait la clef des mystères…


En sortant du musée, nous avons été rattrapées par le désagréable sentiment d’insécurité qui règne dans le centre historique de la ville et les minutes pour attendre notre taxi ont été très longues…Nous avons pu retrouvé Marta chez elle qui nous a gentiment offert à boire et prêté des accessoires pour la “Noche de Catrinas” qui nous attendait alors! En effet, nous avions réservé dans un restaurant (conseillé par Marta), El Mexicano où l’on peut se faire maquiller en “Catrina” et pour le concert qui était prévu après, “Candelight Dia de muertos”, un concert spécial en l’honneur de la fête des morts à la lueur des bougies, cela était juste parfait! Les mariachis et leur entrain légendaire nous ont quelque peu manqué dans cette ambiance tamisée, un peu lugubre mais dont les chants traditionnels entonnés par le public créaient une atmosphère particulière…

A la fin du concert, nous avons pu nous rendre compte à quel point le monde est petit car nous avons fait la connaissance d’une autre fille, mise en beauté façon Catrina pour l’occasion, qui est également française de la région parisienne! Nous avons aussi pu faire une photo avec l’un des musiciens du film d’animation Coco, quel honneur!

Après cette nuit magique, le retour en taxi a été très éprouvant car nous avons eu un mauvais feeling avec le chauffeur et se sentir aussi vulnérables fait enrager et rend palpable que tout moment peut être le dernier… surtout quand on est une femme. Telles des “Catrinas”, nous avons entrevu notre vie défiler! Non, plus sérieusement, plus de peur que de mal mais cela nous a complètement passé l’envie de sortir de nuit bien que notre soirée fut enchanteresse…


Embrasser Dia de Muertos c’est ne faire qu’un avec cette tradition si particulière dont nous nous sentons si proches depuis très longtemps. C’est une fête magnifique où la place est faite aux défunts aimés qui reprennent leur place le temps d’une nuit ou deux grâce au chemin de fleurs de cempasuchiles qui les guident jusqu’aux autels qui leur sont dédiés avec tout ce qu’ils aimaient: plats préférés, animaux de compagnie, activités, comme une trace de leur vie laissée derrière eux… C’est pour cela qu’ici célébrer les morts s’apparente à une véritable fête : ça n’a rien de triste en réalité puisque c’est le moment où les êtres que nous aimons nous rendent visite et nous disent qu’ils nous attendent de l’autre côté…

Jour 7: San Angel, paradis de l’artisanat

Un samedi reposant qui commence par une petite manucure dans Polanco (pasaje Polanco) où de nombreuses boutiques de mode et d’artisanat nous font de l’œil, nous y retrouvons la marque Cuicari dont nous vous reparlerons plus tard sur le blog! Ensuite, tout s’enchaîne (quand-même!) car Marta nous propose un super programme : passer tout l’après-midi dans le quartier de San Angel voir les “Maisons- jumelles” de Diego Rivera et Frida Kahlo puis manger et enfin se promener dans le “bazar del sabado”, l’incroyable marché d’artisanat qui a lieu chaque samedi.
Nous arrivons dans un quartier résidentiel de haut standing où les bougainvilliers viennent parsemés les façades, puis dans la rue Diego Rivera à l’entrée de l’atelier de Diego et de celui qu’il a fait construire pour sa Frida.

Des maisons “jumelles” reliées par une passerelle qui traduisent l’amour que se portaient ces deux artistes, deux âmes sœurs qui ont fait vibrer le monde de l’art à la sauce mexicaine! Celle de Frida est reconnaissable par ce bleu cobalt si caractéristique, tandis que celle de Diego est couleur tomette (comme l’était notre chambre d’adolescentes, quand nous rêvions de l’Amérique latine depuis notre banlieue parisienne quelque peu terne…) Si la maison de Coyoacan n’a pas perdu son âme, celle-ci est un peu vide et mérite le détour surtout pour la pièce où la collection d’objets préhispaniques du maître côtoie les sculptures de papiers mâchés, entre chimères et squelettes.

Nous avons eu un coup de cœur pour le magnifique portrait de Dolores Olmedo, fervente amie du couple mythique et collectionneuse de leurs œuvres à tous les deux, une splendide femme incarnant aussi bien le glamour hollywoodien des années 50 que le style mexicain de Rivera avec ses couleurs chatoyantes, son trait épuré et magistral.


Après cette belle visite, nous avons eu la chance inouïe de suivre Marta jusqu’à un magnifique restaurant au milieu du bazar où le chef nous a reçu avec un accueil très amical. D’ailleurs, on a trouvé qu’il ressemblait à un personnage de dessin animé avec ses moustaches et ses lunettes rondes et rouges! Ici, la carte des menus de restaurant change en fonction de l’heure mais encore une fois, Marta a osé demander une “enchilada de mole” car nous n’avions pas encore eu l’occasion de goûter ce plat typique mexicain, inconnu outre-atlantique! Il s’agit d’un plat de poulet qui mijote durant des heures et des heures dans une sauce agrémentée de pratiquement toutes les épices et condiments possibles: cacao et piment mais aussi clous de girofle, cannelle, cardamome, sel, sucre… Un secret dont les Mexicains peuvent s’enorgueillir et la enchilada d’hier restera gravée dans nos papilles comme le premier ceviche liménien que nous avons goûté au Pérou, comme ces plats savoureux qui offrent tout l’amour d’un pays sur un plateau!


Un moment de dégustation magique qui a précédé une déambulation dans les ruelles du marché d’artisanat splendide de couleurs et de petites merveilles! Impossible de vous en faire une description exhaustive tant il y avait à voir: des altares (autels) de dia de muertos partout, des objets ciselés parfois tout un monde dans une coquille de noix! Du chocolat au goût sans égal, des bijoux ornés de pierres locales (agathe, jade, obsidienne, perles…), des coeurs d’ex-voto sur tous les murs, des animaux incroyables entre lesquels des axolotes ou xolocuintles… Nous finissons cette belle promenade par un passage dans le marché aux fleurs de San Angel où le cempasuchil d’un orange éclatant s’harmonise aux crêtes de coq fuchsia…
Une chose est sûre: nous reviendrons samedi prochain dans cet écrin d’artisanat!


Jour 9: Site archéologique de Teotihuacan, déjeuner à La Gruta et Todos los Santos (Toussaint) à Coyoacan

Nous avons la chance d’être allées visiter le magnifique site de Teotihuacan, (le plus proche de Mexico CDMX), et aussi l’un des plus anciens du pays et de Méso-Amérique. Le soleil nous a encore accompagné pour notre plus grand plaisir et notre chauffeur étant près un peu avant 8h, cela nous a permis d’assister à une vue incroyable avec une envolée de montgolfières qui surplombaient les pyramides…

De plus, nous avons profité d’être arrivées tôt pour découvrir le lieu sans la multitude de touristes. Nous avons dû refuser la sollicitation d’un guide qui voulait d’ailleurs commencer par la visite d’un atelier de pulque (un des alcools traditionnels mexicains avec le mezcal et la tequila) car non pas que nous prétendons tout savoir sur Teotihuacan et les anciennes civilisations méso-américaines, j’ai (Olyanna) bien étudié l’archéologie pré-hispanique à la Sorbonne avec mes chers professeurs, Monsieur Daniel Levine dont je salue l’enseignement tout particulièrement ici et Monsieur Christian Duverger.

Teotihuacan, “la cité où les hommes deviennent des dieux” offre une promenade aussi édifiante qu’agréable, nous avons commencé, sur les conseils de Marta, par la Pyramide de la Lune, magnifique. Nous avons profité d’une vue dégagée et du souffle qui règne sur ce site ancien. Le temps où il était possible de ramasser des bouts d’obsidienne en contournant ce temple par la droite est révolu car les accès y sont désormais fermés, nous avons donc poursuivi notre chemin sur la légendaire Calzada de los muertos “chaussée des morts” où des esplanades en escaliers se succèdent jusqu’à la colossale Pyramide du Soleil sur la droite dans cette allée centrale.

Là, des chercheurs et archéologues étaient en train de s’affairer et martelaient les pierres, le dos courbés, en quête d’autres trésors à découvrir, une ambiance dans son jus où la nature a repris depuis longtemps ses droits. Nous avons acheté quelques premiers souvenirs à des petits marchands et artisans locaux dont des sifflets en forme de tête de guerrier-jaguar pour tenter d’effrayer nos élèves lorsqu’on sera chacune de retour en classe! Notre âme d’enfant s’est exercé à siffler et à imiter le divin félin! C’était juste génial de pouvoir se promener sur un tel site. Nous sommes arrivées jusqu’au temple de Quetzalcóatl dont nous avions vu des reconstitutions en couleurs au Musée National d’Anthropologie, nous y avons aperçu des têtes tenons et des restes d’aplats colorés, témoignant de la richesse passée…

Puis nous avons rebroussé chemin en route, après une si belle matinée, vers le restaurant mythique recommandé par Marta, “la Gruta”, un restaurant dans une grotte comme son nom l’indique, où de grandes personnalités du Mexique et d’ailleurs, ont déjà eu l’occasion de se rendre, comme Frida et Diego, por supuesto, mais aussi, plus surprenant, Charles de Gaulle ou l’écrivain argentin Borges…

Nous avons admiré l’écrin de ce restaurant niché dans un endroit vraiment atypique et la splendide décoration pour Dia de muertos avec toutes les fleurs de cempasuchiles, crêtes de coq fushia, calaveras et toutes les bougies, d’autant qu’à la fin du repas, les serveurs offrent une petite bougie (par table) à aller mettre sur “l’altar” (l’autel) en racontant la légende de Quetzalcoalt relié à celle de la grotte considérée dans le monde pré-hispanique comme l’utérus du monde, les entrailles de l’humanité… On dispose alors une bougie pour invoquer la renaissance qui s’opère dans ce lieu magique et chasser toutes les mauvaises ondes comme à la fois pour honorer les défunts lors de la fête des morts.
Après cette pause entre détente et rituel, nous reprenons le chemin du retour vers CDMX.

Arrivant en milieu d’après-midi, le ciel s’est voilé et nous voilà en chemin vers Coyoacan pour un petit goûter “tranquille”! Nous avions oublié, l’espace d’un instant, qu’aujourd’hui tous les Mexicains célèbrent le premier jour de Dia de Muertos! Et si nous avons raté le défilé haut en couleur du dimanche (hier, nous avons eu besoin de nous reposer et de ne rien faire), aujourd’hui nous avons été servies en folklore et traditions! Pour commencer, tout le monde ou presque arborait des costumes époustouflants dans un drôle de mélange entre Dia de muertos et Halloween, et quand nous disons “tout le monde”, c’est réellement le cas, des bébés aux animaux de compagnie, chiens en avant-première sans oublier lapins et autres petits êtres surprenants! Des Catrinas aux yeux révulsés et couronnes de fleurs, des lloronas aussi sombres que multicolores, des clowns incroyablement flippants aux dinosaures amusants, des Harley Queens de tout âge aux Frankenstein les plus kitsch, tout y était! Nous avons succombé à cette joyeuse kitscherie en prenant la pause avec deux femmes déguisées en calaveras Frida qui représentaient le célèbre tableau de la fille de la Révolution “Les deux Frida”, un de nos préférés, forcément!

Nous en avons profité pour commencer nos petites emplettes d’artisanat au son de la célèbre chanson Llorona jouée aux détours des rues par différents musiciens, réjouies et émerveillées par cette culture fascinante qu’est la culture mexicaine.

Jour 10: Recueillement au Panteon de Dolores et hommage à Diego Rivera jusqu’à l’Anahuacalli

Une belle dernière journée, non pas du voyage, mais avec notre nouvelle amie, “nuestra Santa Marta de los Mariachis”, ainsi nous avons rebaptisé notre amie française qui, depuis notre arrivée, nous donne tous les meilleurs plans pour passer un voyage inoubliable à Mexico. Nous sommes ravies d’avoir fait sa rencontre et d’avoir pu partager des moments aussi précieux avec elle.Aujourd’hui, tout a commencé par un café sur la terrasse de Marta, au soleil, en mode détente, que ça fait du bien!

Puis le programme de la journée a commencé, nous avons pris un taxi pour nous rendre au Panteon civil de Dolores, c’est-à-dire un des plus grands cimetières de la ville où, en ce jour de Dia de Muertos, les mexicains viennent se recueillir sur la tombe de leurs défunts adorés en apportant des gerbes de fleurs de cempasuchil, des crêtes de coq, des roses et autres fleurs multicolores. L’ambiance y est unique et totalement authentique, ici, pas de mise en scène mais de réelles émotions, de la tristesse bien sûr, mais aussi de la joie de partager quelques tacos autour de la tombe, ou même de partager des mets plus simples comme des antojitos (chips, sodas, bonbons…) Les gens viennent en famille, parfois seuls, déguisés façon Dia de muertos ou Halloween, et mettent de la musique: les chansons qu’aimaient leurs proches qui ont rejoint le ciel… celles qui leur évoquent les souvenirs partagés car que restent-ils se ce n’est ces souvenirs que la mort elle-même ne peut pas reprendre?

On peut dire que les Mexicains nous touchent dans leur manière bien à eux de rendre hommage à leurs morts, de célébrer d’autant plus la vie et de partager, d’être ensemble coûte que coûte. Marta nous a gentiment demandé si ça nous faisait “bizarre” d’être là, au milieu des sépultures étrangères, certaines magnifiques, d’autres complètement abandonnées? Et la réponse est non car comme nous lui avons répondu, “nous avons tous des morts à pleurer”, il y a quelque chose de profondément universel dans ce folklore si marqué…

Nous avons tout de même souligné la multitude de tombes d’enfants (les mieux décorées ou parfois totalement kistch mais si touchantes) et de jeunes jusqu’à une qui nous a valu une petite explication de Marta en passant, une tombe de narco car y figurait un symbole emblématique, la “Santa Muerte” (la mort représentée en squelette avec sa grande faux), “sainte” patronne des narcotrafiquants, la chair de poule s’est alors hérissée sur nos bras le temps d’un instant. Nous clôturons ce chapitre sur le Panteon de Dolores par la première tombe que nous avons vu, celle du grand Diego Rivera. Lui qui aurait pourtant voulu être aux côtés de sa Frida dans la mort: son ultime volonté n’a pas été respectée et il est donc enterré dans ce cimetière civil mexicain parmi le peuple qu’il chérissait aussi.

En reprenant le taxi, nous nous sommes dirigées vers le bois de Chapultepec, immense, pour nous rendre à l’autel du Musée Dolores Olmedo (déporté momentanément là car pour le moment, ce musée demeure encore fermé). Ce n’était pas seulement un altar mais tout une histoire du Mexique racontée à travers des munecos de papiers mâchés façon calaveras (têtes de mort et squelettes), de l’ère préhispanique, de l’apogée des aztèques à leur rencontre avec Hernan Cortés il y a tout juste 500 ans cette année, en passant par l’indépendance du pays dont Hidalgo et Morelos ont étaient les pères fondateurs de la nation lors du “Grito de Dolores” (1810). Nous avons eu une pensée pour les magnifiques représentations équestres de Bartabas, et notamment le spectacle qu’il avait consacré à Dia de Muertos (“Calacas” par la troupe Zingaro). Là, un autre altar édifiant s’est imposé à nos regards, celui qui rend hommage à Dolores Olmedo, amie du couple Rivera-Kahlo et fervente mécène de l’art et du folklore mexicains.


Que d’émotions et de couleurs plein les yeux jusqu’au début d’après-midi où Marta a proposé que nous fassions une courte pause par chez elle et que nous allions manger! Nous avons eu la chance d’aller chez “Taquearte” où comme l’indique le nom de cette chaîne de restaurants, c’est “l’art du tacos”, cette spécialité culinaire purement mexicaine composée de tortilla de maïs, de viande, oignons, coriandre et différentes sauces de la plus fumée à la plus piquante… Nous avons pu boire une délicieuse boisson “horchata” à base de riz et de cannelle, un régal!


Puis en voiture dans celle de Marta cette fois, nous voilà reparties pour l’Anahuacalli: le musée d’art pré-hispanique de Diego Rivera. La chance nous accompagne à chaque fois, nous espérons que cela va continuer et la visite de cet incroyable musée, émouvante également car je (Olyanna) l’ai étudié et mon professeur, Monsieur Levine me l’avait toujours chaudement recommandé… s’accompagnait de la foire du chocolat! “Qué padre!” Nous avons donc parcouru toutes les salles du musée qui comme le voulait Rivera, imite un temple pré-hispanique, tout de pierres volcaniques depuis le rez-de-chaussée avec un magnifique altar jusqu’à la terrasse lumineuse, profitant alors d’un beau coucher de soleil. Ce temple des temps moderne met à l’honneur l’incroyable collection de Rivera, qui réunit pas moins de 59000 pièces des civilisations préhispaniques, de petites figurines à des stèles et statues impressionnantes, ce musée encore peu connu vaut le détour pour s’imprégner de cette culture fascinante.


Le festival du cacao contribuait à créer une ambiance chaleureuse et nous avons pu goûter différents échantillons de chocolats aussi délicieux que raffinés, des mélanges surprenants comme le cacao et le piment ou voir les exposants créer de l’écume de cacao avec leurs petits ‘remollinillos” (remueurs, un ustensile que nous ne manquerons pas de ramener en souvenir à notre grand-mère Michèle, si gourmande!)

Jour 11: Expédition dans les grottes et eaux turquoises de Tolantongo (Etat d’Hidalgo)

Comme des sirènes dans l’eau, nous nous sommes offert une superbe excursion dans un paysage enchanteur. Un lot de consolation à défaut de se précipiter dans le Yucatan que nous n’aurions vu que de manière superficielle, comme bon nombre de touristes (la plupart d’ailleurs) et qui nous a permis de profiter des merveilles cachées au centre de ce pays immense. Nous avons choisi l’expérience sur Airb’n’b car cela nous semblait cette fois plus confortable mais à notre grande surprise, ce sont aussi des locaux qui se chargent de l’organisation. Et le programme était juste parfait. On vous emmène?


D’abord, une route de presque 3 heures à travers le Mexique, nous avons pu voir le soleil se lever sur les routes qui deviennent de véritables livres ouvert: regarder la route en dit bien plus long que de regarder n’importe quel reportage. D’ailleurs, nous sommes repassées par les bidonvilles qui bordent les alentours de Ciudad de Mexico, de toutes les couleurs mais ici la peinture est une bonne couche d’hypocrisie car les maires donnent de la peinture “en pâture” aux gens pour qu’ils puissent peindre leurs misérables habitations et donner une image de “carte postale” pour ne pas heurter le touriste de pays riche pour qui les problèmes ne sont pas les mêmes…
Nous avons à nouveau une pensée pour notre film préféré: Carnet de voyage, (Diarios de motocicleta, par Ernesto Guevara, le futur Che, s’il faut encore le présenter). Une enfilade de commerces de fortune, ici appelés abarrotes dont la traduction n’est pas aisée, des postes de tacos à l’infini (tous les 100 mètres) ainsi que de pastes (l’autre nom des empanadas) très répandus dans l’état d’Hidago qu’on a pu goûter au petit déjeuner avec notre groupe pour la journée (nous étions 7: deux mexicains dont un d’origine syrienne, blond comme un polonais ;), deux filles hawaïennes et un jeune homme de Washington D.C qui ressemblait à s’y méprendre à Jésus! Que de fous rires avec ça!)

Juste avant d’arriver sur les lieux, Enrique et Taz se sont arrêter à un petit mirador avec une mini chapelle dédiée à la Virgen de Guadalupe et d’où on pouvait profiter d’une vue imprenable sur le canyon et quelques aigles qui volaient ici et là, sur fond de ciel bleu, de cactus et avec le soleil, c’était splendide.

Nous voilà arrivées à l’incroyable grotte de Tolantongo où l’eau qui coule est invraisemblablement limpide, turquoise et…chaude! Quel bonheur! Mais, là, c’était le côté sportif de l’excursion (que nous n’avions pas prévu mais heureusement les chauffeurs nous ont fait acheter tout ce dont on avait besoin : chaussures aquatiques indispensables et étui étanche pour le téléphone portable!) car après être entré dans cette eau chaude exquise, nous voilà parties sur les traces de Taz l’aventurier (un de nos guides) dans tous les recoins inattendus de la grotte: claustrophobes et petites natures, passez votre chemin!!! C’était très physique en effet, nous avons dû avancer dans la grotte (et dans l’eau) en rappel, en nous accrochant à une corde qui suivait les parois escarpées des murs, le courant était très fort et l’eau nous tombait en cascade sur la figure, rendant l’exercice quelque peu éprouvant, puis nous nous sommes hissées dans un espèce de trou où il fallait se mettre dos en arrière et baisser la tête (là nous sommes ravies d’être toutes petites, de bolsillo, “de poche”!): une vraie cachette de poulpe! Heureusement pas de mollusques par ici mais un endroit tout étriqué où on peut boire l’eau qui coule d’en haut, pure et minérale. En ressortant de ce trou, nous poursuivons Taz dans les recoins de la grotte et là, il nous montre avec la lanterne de son téléphone, tout un nid de petites chauves-souris qui prennent leur envol sous nos yeux! Spectaculaire!

Ensuite, nous profitons de la baignade dans les eaux chaudes de cette grotte merveilleuse puis nous descendons en bas du site où se trouve un fleuve “en escalier” où les bassins d’eaux turquoises se succèdent. Taz nous montre comment réaliser un exfoliant pour le corps en allant chercher des poignées de boue ultra douce pour s’enduire complètement, une expérience géniale, les spas parisiens n’ont qu’à bien se tenir! Nous prenons le temps de sécher au soleil, sur les rochers, telles des sirènes et des demi-dieux aztèques quasi statufiés et plouf, une fois que nous avons plongé dans l’eau, nous voilà toutes douces, avec une peau régénérée.


Vient la pause déjeuner, inclus dans le coût de l’expédition, le restaurant n’avait rien d’exceptionnel mais contribuait au moment détente de la journée, nous avons tout de même pu manger un “platillo otomi” avec de la feuille de nopal en tamal, ce n’est pas ce qu’on préfère mais c’était intéressant.

Nous avons dû reprendre la voiture (environ un quart d’heure au lieu de 40 minutes de marche!) pour aller aux piscines naturelles et là, l’émerveillement était encore au rendez-vous! Fidèles aux photographies, c’est une mosaïque de bains (comme de véritables baignoires naturelles) encastrés à flanc de falaise et avec le peu de fréquentation qu’il y avait hier, on pouvait carrément se “privatiser” un bassin pour chacun d’entre nous! Là, aussi l’eau s’offre à 30 degrés environ et nous avons ainsi passer tout le reste de l’après-midi à nous prélasser avec notre groupe de nouveaux amis mais aussi toutes les deux et à se régaler de la vue fantastique devant nous…


Une journée de pure décontraction avant de reprendre la route by night, longue, dans un pays où la lumière n’est pas pour tout le monde.

Jour 12: Visite du Musée d’art populaire de Mexico et achat d’artisanat à Coyoacan et fin du voyage…

Nous sommes retournées dans le centre historique de Mexico pour visiter le splendide musée d’art populaire recommandé par notre amie joaillière Esty et ce fut un véritable bonheur! Le musée est magnifique, les salles y sont très bien présentées et il y a toute sorte d’objets: des vases aux meubles en passant par des bijoux, vêtements, poupées etc.


Nous avons d’abord pu admirer de gigantesques alebrijes : des animaux fantastiques typiquement mexicains en bois ou papier mâché peints de toutes les couleurs.Ils représentent les esprits et sont également populaires lors de la fête de Dia de muertos. La muséographie est très réussie car chaque salle a son atmosphère, nous avons apprécié celle qui se divise en cosmogonie préhispanique avec des pans de murs consacrés aux dieux du panthéon aztèque, puis des objets issus du syncrétisme religieux suite à la “rencontre” avec l’envahisseur espagnol. C’est très riche et au milieu, entre ces deux parties opposées, on rentre dans l’inframonde avec un chemin de cempasuchil (en stickers) et  imitant une caverne nous voilà plongées dans les limbes, entre calaveras plus vivantes que mortes, squelettes rieurs et festival de couleurs…


Nous avons également apprécié tous les vêtements régionaux (des femmes surtout) ainsi que les bijoux et accessoires (ceintures, sacs) témoignant d’une diversité culturelle incroyable et parmi les robes exposées, nous avons bien sûr reconnu la robe Tehuana, favorite de Frida Kahlo.


Une autre salle a particulièrement attiré notre attention: celle des sirènes du folklore mexicain! Représentée en terre cuite, en peinture, de différentes façons, cette salle montre l’importance de ce personnage féminin mi humain mi poisson qui navigue entre les mondes et porte en son for intérieur le pouvoir de l’union.


Nous vous proposons quelques photos et nous avons été admiratives devant le magnifique altar du MAP (Museo de Arte Popular) avec ses Catrinas à chaque côté ainsi que devant des œuvres plus contemporaines toutes en papier journal, publicitaire etc. d’une finesse remarquable.


Après cette demi-journée passionnante, nous voilà en route pour Coyoacan, notre quartier préféré que nous avons choisi au détriment de Ciudadela (grand marché d’artisanat du centre) car bien que les prix semble plus intéressant, nous sommes bien moins à l’aise dans ce quartier. Nous avons trouvé notre bonheur pour notre famille et nos proches, plein de souvenirs locaux, entre masques de luchadores à l’effigie de Rey Misterio et bibelots en tous genre!

Nous avons eu un énorme coup de coeur pour les poupées Barbie (oui oui) “Signature” spéciales Dia de muertos 2020 (l’année où le voyage était prévu) et Dia de muertos 2021 (qui rappelle vraiment la Noche de Catrinas que nous avons pu vivre!). Nous étions comme des petites filles, ébahies par la beauté de ces poupées de collection qui ferons des heureuses dans la famille!

C’est ainsi que s’achève très bientôt ce beau voyage, qui malgré toutes les difficultés liées à l’organisation (en pleine pandémie) vaut plus que la peine! D’ailleurs, à ce sujet, nous avons trouvé que la gestion du Coronavirus est beaucoup plus cohérente au Mexique qu’en France: pendant le voyage, nous avons été de nombreuses fois désinfectées, le gel hydroalcoolique n’a pas manqué, les températures sont prises quasiment à l’entrée de tous les lieux qui brassent de la foule et pourtant pas d’amende lorsqu’on retire notre masque pour marcher dans la rue (même si beaucoup le garde: ce qui semble “normal” dans un pays où l’accès aux soins est encore bien trop chaotique…).

Nous sommes tellement heureuses d’avoir pu vivre ce voyage, de s’être imprégnées de cette ambiance si spéciale de Dia de muertos, d’avoir marché dans les pas de nos deux artistes préférés, Diego Rivera et Frida Kahlo, d’avoir vu des merveilles que ce soit des sites archéologiques préhispaniques, les musées fantastiques ou les paysages contrastés avec ses routes si éloquentes et des lieux magiques comme Tolantongo… Nous pouvons dire qu’avec le Pérou, pays si cher à notre cœur, nous avons pu voir les deux plus grands foyers de civilisations indigènes d’Amériques Latine les plus grands du monde: l’empire Inca et l’empire Aztèque, les peuples du soleil et de la lune et nous avons donc pu réaliser un autre rêve qui appelle à découvrir tout le reste de l’Amérique Latine.


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